Edan Tapp: quand tu n’es pas né dans le bon corps

Aujourd’hui nous avons eu la chance de parler à un jeune de 20 ans, Edan Tapp, auparavant prénommé Catherine. Cet homme né dans le corps d’une femme a su nous parler de son expérience.

Toi, tu es transgenre, peux-tu nous expliquer la différence entre être transgenre et transsexuel ?

La première différence, c’est que les personnes s’identifiant en tant que personne transsexuelle sont des personnes ayant complétées toutes les opérations de réassignation sexuelle (qui diffèrent chez les hommes et femmes transgenres), tandis que les personnes qui s’identifient en tant que personne transgenre, n’ont pas complété toutes les opérations de réassignation sexuelle. Le terme transgenre est aussi utilisé en tant que terme général englobant les deux termes mentionnés plus haut.

Merci pour l’explication ! Penses-tu un jour devenir transsexuel ?

Je peux pas vraiment devenir transsexuel dans le sens ou peu importe si j’ai les opérations de réassignation sexuelle ou pas, je reste quand même transgenre. La question à poser serait plutôt si j’allais justement recourir aux opérations de réassignation sexuelle plus tard, et là je pourrais te répondre que oui. Tout dépend de l’évolution de la technologie, mais c’est clair que je vais y recourir d’une façon ou d’une autre.

Comment as-tu découvert que tu étais transgenre ?

J’aime me dire que je l’ai toujours su. J’ai jamais eu un caractère typiquement féminin, j’ai eu très peu d’amies filles quand j’étais au primaire et j’ai été rejeté très tôt dans ma jeunesse. Le fait que la puberté allait changer la façon dont j’allais me présenter en tant que personne, et ce, différemment de la façon dont mes amis gars allaient se présenter eux aussi. J’ai appris sur Internet ce que le terme transgenre voulait dire quand j’avais environ 15 ou 16 ans, sur le site web Tumblr, et je m’y suis tout de suite identifié parce que chaque article que je lisais me caractérisait parfaitement.

À qui as-tu annoncé cette nouvelle et comment l’as-tu annoncée ?

Je pense que c’est important de savoir que j’ai pas fait mon coming-out avant mes 18 ans, le temps de savoir comment je me sentais et de savoir si c’était vraiment la bonne décision à prendre, mais la première personne à qui je l’ai dite s’avère être l’une de mes bonnes amies du Cégep. Elle s’appelle Alice. Je lui ai écrit sur Facebook pour lui dire, tout simplement, et je suis pas passé par quatre chemins. J’ai décidé d’y aller droit au but pour éviter que les nerfs me bouffent de l’intérieur, et elle l’a super bien pris!

Et comment les autres autour de toi ont réagi ?

Je l’ai annoncé à mes autres amis, qui l’ont tous aussi bien pris. J’ai eu un peu plus de difficulté avec ma copine du moment (je ne nommerai pas de nom), qui ne comprenait pas trop, mais qui me supportait quand même. J’ai réussi à le dire à mes parents par la suite, et je dois dire que leur réaction a été la plus difficile et la plus explosive, surtout du côté de ma mère. Elle ne comprenait pas vraiment, le terme ne lui était pas familier et ça lui faisait probablement un peu peur de voir que l’enfant qu’elle avait élevé en petite fille pendant 18 ans lui annonçait qu’il était finalement un garçon. Ça a pris du temps, mais elle s’est renseignée, s’est calmée et on en a parlé longtemps. Mais maintenant mes parents sont mes fans numéro un !

C’est très inspirant et touchant comme histoire. Et vraiment cute ! Comment est-ce que tu as choisi ton nouveau nom ?

Ça a été tout un processus pour le choix de mon prénom ! J’étais sur Facebook avec mon amie Alice et je cherchais sur des listes de noms pour bébés, et elle m’aidait. En faisant un peu de recherche, elle m’a proposé Edan, un prénom masculin celte qui voulait dire ” petit feu ”. J’ai trouvé que ça me correspondait très bien, sachant que je suis Sagittaire et que c’est un signe zodiaque de feu… Alice m’a aussi dit que puisque j’étais pas très grand, et que je déplaçais beaucoup d’air, que ça m’allait très bien. J’ai aussi choisi mon deuxième prénom, qui est Léo, en l’honneur de mon grand-père du côté de mon père, qui est décédé il y a de cela quelques années.

Est-ce qu’il y a encore des gens qui t’appellent par ton ancien prénom ? Si oui, comment le prends-tu quand ils le font ?

Les seules personnes qui utilisent encore mon ancien prénom sont des gens qui me connaissent, mais qui me connaissent pas vraiment; des clients au Provigo, qui me voient une fois par semaine, et qui ne connaissent pas tout le processus de transition dans lequel je suis. Comme je suis au travail, je leur réponds et je fais comme s’il n’y a pas de problèmes. Si quelqu’un m’interpelle dans la rue et qu’il utilise mon ancien prénom, je vais avoir tendance à les ignorer, juste parce que c’est pas moi, ou du moins, ce n’est plus moi. Ça me rend vraiment mal à l’aise de voir que des gens utilisent encore mon ancien prénom, mais je peux pas demander aux gens qui le savent pas d’utiliser les bons pronoms et le bon prénom, tu sais ?

Oui c’est sûr! Pour terminer, aurais-tu un message à dire pour les jeunes qui vivent la même chose que toi ou une situation similaire où ils sont encore dans le placard ?

Si j’avais une chose à dire à toutes les personnes trans qui n’osent pas sortir du placard, c’est juste d’oser. Non, les gens comprennent pas. Oui, ils vont poser des questions stupides. Leur manque de connaissance va te faire mal, te prendre par surprise, te faire douter du processus et de si ça vaut la peine d’attendre et d’attendre encore, pour te faire dire que t’as encore l’air d’une fille ou d’un garçon. Au final, faut juste que tu saches que tu le fais pour toi et pas pour les autres; qu’au final, tu changes et tu défies les normes du genre et tu brises les murs de la transphobie parce que tu veux juste être toi-même, et non pas l’ombre d’une personne dans un corps qui te correspond pas. Love only, man. Prends ça un jour à la fois, puis toute va bien aller.

 

Écrit par Laurence Lajeunesse et Léa Lamontagne