Une formation militaire

René, tu m’as déjà compté que tu étais militaire avant de devenir policier à Sherbrooke. Il y a un sujet que tu as déjà effleuré mais jamais entré en profondeur. Tu nous as déjà parlé d’une formation de survie en forêt. Je vais te poser quelques questions si tu peux nous y répondre, ce serait génial !

 

Pourquoi faisiez-vous cette formation ?

L’armée nous a fait cette formation dans l’objectif de nous préparer à survivre seul en forêt en cas d’écrasement d’avion, d’hélicoptère ou simplement de survivre si l’on se retrouve isolé du reste de notre groupe.

Combien de temps a duré cette formation ?

C’est une formation de deux mois. Les deux premières semaines sont composées de cours théorique sur quoi faire, quand le faire, et comment le faire. On nous a donné des cours sur les plantes comestibles, les champignons, les techniques de chasse, de pêche, comment préparer un campement et plusieurs autres choses plus approfondies.

Par la suite, on nous a envoyé six semaines dans la forêt avec aucun contact humain.

 

Qu’avais-tu comme équipement de départ ?

Nous avions un couteau militaire avec une scie d’un côté et dans le manche des allumettes imperméable, un kit d’hameçon, du fil de pèche, des bandes de tissus colorés, du fil de cuivre (pour faire des collets), des gélules afin de purifier l’eau, un demi parachute, une boussole, un sac de couchage militaire, une lampe de poche, un pistolet d’urgence (fusée) en cas de besoin.

Que mangeais-tu pendant ta formation ?

J’ai eu à manger du lièvre, du brochet, de la perdrix, vers blanc (que l’on retrouve dans le bois mort), fruit sauvage, bulbe de quenouille, aille des bois, le bois des nouvelles pousses de framboisier, foin, pissenlit, couleuvre, goéland (à ne jamais manger) et du porc-épic (l’une des rares viandes qui peuvent être manger cru (interdiction de chasser pour cette raison).

 Comment tes supérieurs faisaient pour savoir que tout allait bien ?

Nous préparions un feu que nous n’allumions que lorsque l’hélicoptère passait si elle voyait la fumée de notre feu. Ils pouvaient conclure que j’allais bien, mais si par contre ils ne voyaient rien les instructeurs arpentait la zone afin de nous porter assistance.

Quelle a été ta pire expérience durant ce périple ?

Les insectes ! On se faisait bouffer tout rond. Pour vrai, si un civil était passé, il aurait eu peur. On avait les paupières si enflées le matin, qu’on devait se les ouvrir avec les mains. Nous étions enflés de partout.

 

As-tu un truc pour nous si l’on devait se perdre en forêt et que l’on était aux prises avec des insectes aussi voraces ?

Bien sûr que j’en ai un ! Lorsque nous étions à proximité d’un réservoir donc nous prenions de la glaise sur le bord et nous nous l’étendions partout où notre corps était à découvert même DANS les oreilles.

Comment dormais-tu ?

Je dormais dans un espèce de tipi. À l’intérieur, on créait un espèce de matelas avec divers matériaux.

Comment le faisiez-vous ?

On le créait en plusieurs épaisseurs. La première était constituée de branchage de sapin. La deuxième était faite de feuille. La troisième composée de fougère puis par-dessus j’ai mis une partie de la toile de parachute.

Et ton sac de couchage ?

Je dormais évidemment dedans par-dessus la toile.

Comment empêchais-tu les rongeurs et les serpents d’aller dans ton sac de couchage pendant la journée ?

Je l’ouvrais et l’accrochais ouvert le plus haut que je pouvais dans les branches d’un arbre à proximité afin qu’il sèche car sinon l’humidité deviendrait très vite agaçante.

Quelle a été ta plus grande déception ?

À la toute fin du voyage, de retour en canot, nous avons demandé si nous pouvions manger de la pizza en revenant au camps (ça faisait un mois et demi que nous mangions des insectes et autre chose du même genre). Ils nous ont promis que nous pourrions manger ce que nous voulions une fois arrivée. Le trajet qui normalement prend deux jours en a pris qu’un seul. Mais une fois assis à la cafétéria avec mes sept autres compagnons, on nous sert… une soupe! Puis-je vous garantir la déception et l’expression incrédule que nous avons lâchées à nos supérieurs. Ils nous ont dit: « Commencez par ça puis si vous voulez encore de la pizza nous vous la donnerons. » Mais à la fin de la soupe, nous ne pouvions plus rien manger même que certains d’entre en furent malade juste avec la soupe (rire) Finalement, je n’ai pas regretté qu’ils nous aient seulement donné une soupe. On a été pendant trois semaines à se réhabiliter à de la vraie nourriture.

René barrette militaire sherbrookois en formation dans le nord du Québec. L’expérience l’a assurément marquée. Cette expérience qui lui en a fait voir de toutes les couleurs n’est pas souhaité comme expérience de plaisir mais pour ceux qui veulent devenir militaire une telle expérience peut vous sauver la vie en temps réel. Bien qu’éprouvant, cet exercice est selon lui nécessaire à la survie des militaires.

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